Indigo (teinture)
Indigotine | |
Identification | |
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Nom UICPA | 2‑(1,3‑dihydro-3‑oxo‑2H‑indole-2‑ylidène)-1,2‑dihydro‑3H‑indole-3‑one |
No CAS | |
No ECHA | 100.006.898 |
No CE | 207-586-9 |
Apparence | Poudre bleu foncé |
Propriétés chimiques | |
Formule | C16H10N2O2 [Isomères] |
Masse molaire[1] | 262,262 8 ± 0,014 5 g/mol C 73,27 %, H 3,84 %, N 10,68 %, O 12,2 %, |
Propriétés physiques | |
T° fusion | 390 à 392 °C (sublimation) |
Solubilité | 990 µg/L à 25 °C (insoluble) dans l'eau, insoluble dans l'éthanol ou l'éther à 20 °C |
Précautions | |
Directive 67/548/EEC | |
Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire. | |
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L’indigo est historiquement la matière colorante bleu-violacé extraite des feuilles et des tiges de l'indigotier. À partir de la fin du XIXe siècle, les chimistes montrèrent que la couleur bleu-indigo extraite de diverses plantes tinctoriales (dont l'indigotier, le pastel des teinturiers en Europe, la renouée des teinturiers en Chine, le Strobilanthes cusia en Asie du Sud-Est, le gara Philenoptera cyanescens en Afrique) correspondait à un même colorant nommé indigotine ou indigo. Les différentes teintures ne se distinguaient que par la nature des impuretés qu'elles recélaient. La langue s'est ensuite adaptée au progrès des connaissances, généralisant l'appellation de « plantes à indigo » aussi bien pour l'indigotier que pour le pastel, la renouée ou le gara. L'indigo est utilisé comme teinture dans de nombreux domaines.
Histoire
[modifier | modifier le code]En 2016, l'usage le plus ancien connu de l'indigo pour teinter les vêtements remonte à 6 000 ans au Pérou[2].
L'indigo véritable était importé en Europe depuis l'Inde durant l'antiquité gréco-romaine[a]. Pendant des siècles, la seule teinture naturelle bleue à pouvoir être produite en Europe a été le pastel des teinturiers. À partir du XVIIe siècle, l'indigo est importé depuis les colonies du Nouveau Monde puis d'Inde où sa culture à grande échelle dans des indigoteries le rendit très compétitif. Il supplante le pastel et ruine les économies européennes qui en dépendaient (dans le sud-ouest de la France notamment).
Les autres matériaux colorants bleus étaient principalement des pigments rares, chers et ne permettant pas de teindre les tissus : l'azurite est un minéral, le bleu égyptien un verre coloré de cuivre, l'outremer du lapis-lazuli broyé, le smalt un verre coloré au cobalt, le bleu de Prusse le premier bleu synthétique découvert en 1706. Tous sont principalement utilisés en peinture.
En 1882, Adolf von Baeyer et Viggo Drewsen proposent la première méthode de synthèse de l'indigotine à partir du 2-nitrobenzaldéhyde et de l'acétone. Cette méthode est restée sous le nom de synthèse de Baeyer-Drewsen de l'indigo.
Propriétés physico-chimiques
[modifier | modifier le code]L'indigo(tine) se présente sous la forme d'une poudre cristalline bleu foncé qui se sublime entre 390 °C et 392 °C. Elle est insoluble dans l'eau, l'éthanol ou l'éther, mais soluble dans le chloroforme, le nitrobenzène ou l'acide sulfurique concentré et très soluble dans le diméthylsulfoxyde (DMSO).
Plusieurs composés plus simples peuvent être produits par décomposition de l'indigo, notamment l'aniline et l'acide picrique. La seule réaction chimique réellement utile en pratique est la réduction de l'indigo par l'urée en indigo blanc. L'indigo blanc est ensuite réoxydé en indigo après avoir été appliqué au produit.
L'indigo traité par l'acide sulfurique produit une couleur bleu-vert. Cette couleur est apparue durant le XVIIIe siècle et a été désignée sous le nom de bleu de Saxe ou carmin d'indigo.
L'indigo a aussi une structure quasi identique au pourpre de Tyr. Seuls deux atomes de brome différencient le 6,6′-dibromoindigo (molécule du pourpre de Tyr) de l'indigo.
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Colorant extrait de l'indigotier déposé sur une feuille de papier.
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Pavé d'extrait d'indigo séché provenant de l'Inde.
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Tissages de coton indigo au Burkina Faso.
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Un blue jean classique coloré à l'indigotine.
Production et synthèse
[modifier | modifier le code]Production naturelle
[modifier | modifier le code]Au moins 3 substances naturellement présentes dans certains végétaux sont les précurseurs primaires du colorant: L'indican (dans les indigoferas, le pastel des teinturiers, et la renouée des teinturiers, entre autres), et les Isatan A et Isatan B dans le pastel des teinturiers. Les précurseurs primaires sont dégradés par divers processus en précurseur secondaire (+ d'autres molécules), l'indoxyle, qui, en s'oxydant, se dimérise et forme l'indigotine (pigment)[3].
L'indican était autrefois extrait de certaines feuilles fermentées et hydrolysées, provenant de végétaux tels que le pastel des teinturiers ou guède cultivé en Europe ou les indigotiers des empires coloniaux à partir du XVIIe siècle.
L'indican peut facilement être hydrolysé en β-D-glucose et indoxyle. Une oxydation douce, par exemple une simple exposition à l'air, transforme l'indoxyle en indigo.
La Schizophyllum commune produit aussi de l'indigo. Dès la fin du XXe siècle la question de l'exploitation par la biotechnologie est posée[4].
Synthèse et production industrielle
[modifier | modifier le code]Un premier procédé de manufacture fut développé dans les années 1860 par Adolf von Baeyer ; un indigo synthétique dit bleu d'indanthrone fut vendu après 1900 par BASF, et amélioré dans les années 1920. Ce procédé est toujours utilisé. L'indoxyle y est synthétisé par fusion du phenylglycinate de sodium dans un mélange d'hydroxyde de sodium et de sodamide, mais ce pigment a une empreinte écologique, carbone et énergétique forte ; et il est couteux, ce pourquoi la couleur bleu indigo est souvent alternativement fabriquée en mélangeant des pigments bleus (outremer, phtalo) et noir.
En 2020, on cherche à produire un colorant indigo via des procédés écologiquement plus soutenables, sans aniline ni pétrole, ni à haute température, ni en consommant du formaldéhyde et du cyanure)[5]. Selon Tammy Hsu, « à l'échelle mondiale, environ 20 % de la pollution industrielle de l'eau provient de la teinture des tissus »[5]. Parmi les pistes d'alternatives, issue de la biomimétique figurent la fermentation microbienne, testée par une start-up californienne (Huue, à Berkeley) avec des bactéries Escherichia coli génétiquement modifiées pour fabriquer le colorant comme il l'est dans les plantes, sans produits chimiques toxiques[5].
Annexes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Sublime indigo : Catalogue de l'exposition au Centre de la Vieille Charité, Marseille, Musées de Marseille - Office du livre,
- Lachaud, Christian (2022). L'Indigo de A à Z. Comprendre, Produire, Teindre. Laval-sur-Luzège (Monographie)
Articles connexes
[modifier | modifier le code]- Indigo (couleur)
- Indigoterie
- Thioindigo, un dérivé dans lequel les atomes d'oxygène sont des atomes de soufre et qui est aussi un colorant
Liens externes
[modifier | modifier le code]Notes et références
[modifier | modifier le code]- Pline signalait que le pigment coloré pourpre, « indicum… vient d'Inde » (H.N. livre XXXV, 46).
- Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
- Hervé Morin, « Un tissu péruvien vieux de 6 000 ans teint à l’indigo », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
- Christian LACHAUD, L'Indigo de A à Z. Comprendre, Produire, Teindre (Monographie), Laval-sur-Luzège, Lachaud, , 416 p., 160 x 240 x 23 mm, 0.75 kg, Broché, Intérieur Couleur, Couverture Couleur Toucher Velours (ISBN 9782954715926)
- Claude Gudin, « La vie nous en fait voir de toutes les couleurs », dans Georges Roque et Claude Gudin, La vie nous en fait voir de toutes les couleurs, Paris, L'Âge d'Homme, coll. « Hypothèses », , p. 37.
- (en) James Mitchell Crow, « The greener route to indigo blue », Nature, vol. 599, no 7885, , p. 524–524 (ISSN 0028-0836 et 1476-4687, DOI 10.1038/d41586-021-03437-y, lire en ligne, consulté le )